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Cinq mots étrangers que le français a adoptés

par webmaster le 13-08-2023

Cinq mots étrangers que le français a adoptés

Le mot «sucre» est passé dans plusieurs langues avant d’être emprunté en français. 189973307/Knuden - stock.adobe.com  «Sucre», «flipper»... Ces termes bien ancrés dans notre belle langue viennent en réalité d’ailleurs. Le Figaro vous propose de découvrir leur origine étrangère. Pour certains mots passés en français, leurs origines étrangères nous paraissent évidentes. C’est le cas de mots comme «shampooing», «weekend» ou «look» qu’on sait issu de l’anglais. Ou «flamenco», «kitsch», «méchoui» qui nous viennent, tour à tour, de l’espagnol, de l’allemand et de l’arabe. Mais pour d’autres termes, leurs origines étrangères passent inaperçues. C’est le cas de «chocolat», «calepin» ou «boulevard» dont on a presque oublié la provenance. «Infiltrés chez nous, ces mots nous sont devenus familiers, au point que nous ne savons plus retrouver leur pays d’origine», note Marie-Pierre Porée, auteur de 200 mots étrangers que le français a adoptés (First). Florilège.

Sucre Il est attesté pour la première fois en français dès le XIIe siècle sous l’orthographe «çucre» puis «zucre», et est défini alors comme une «substance de saveur douce extraite de la canne à sucre». Ce n’est qu’au XIIIe siècle qu’il prend la forme qu’on connaît de nos jours. Le sucre a fait un long voyage avant de parvenir dans notre langue et dans notre assiette. Il est en effet emprunté à l’italien «zucchero», lui-même emprunté à l’arabe «sukkar» qui est un mot d’origine indienne, en sanskrit «çârkara», d’après ce qu’on peut lire dans le Dictionnaire historique de la langue française. Les Arabes cultivaient la canne à sucre d’abord en Égypte, puis en Andalousie et en Sicile, d’où viendra le produit exporté en Italie. C’est de là que le mot est apparu dans les pays chrétiens, sous la forme «zucchero». De là, il a été emprunté par l’allemand (zucker), le français, l’anglais (sugar) et le néerlandais (suiker).

Mannequin La définition moderne du mot est la suivante: une «mannequin» est une «jeune femme qui porte les modèles des couturiers pour les présenter au public dans les maisons de coutures ou poser pour les magazines de mode». On parle ainsi de «taille mannequin», depuis 1892. Mais le mot, au départ, n’avait rien à avoir avec l’allure longiligne des «top model». Le français l’a emprunté au néerlandais «mannekijn», c’est-à-dire «petit homme» ou «bambin», mot dérivé de «man» pour «homme» avec le suffixe diminutif «-kijn». Ce sens-là a disparu au profit de «figurine humaine». Le «mannequin» était donc le nom qu’on donnait à une figure (de bois ou de cire) puis à une statuette articulée pouvant prendre diverses positions et servir de modèles aux peintres et sculpteurs. Avec l’apparition des devantures de magasins au XIXe siècle, le mannequin est devenu une forme humaine que l’on habille et que l’on met en vitrine. Le mot s’est ensuite appliqué aux hommes sur qui on essayait les vêtements.

Sorbet Le «sorbet» vient de l’arabe, «surba» c’est-à-dire «boisson». La langue française l’a emprunté aux Italiens, «sorbetto», au XVIe siècle, lui-même emprunté au mot turc «chorbet» et avant au persan «sarbat». Au départ, le «sorbet» est une «boisson à base de citron, de sucre et d’eau». De fil en aiguille, on est passé de la préparation glacée à l’eau et au suc de fruit à partir du XVIIIe siècle. C’est ainsi que, comme l’écrit Marie-Dominique Porée: «On retrouve ce savoureux entremets dans les restaurants [...] pour permettre une meilleure digestion, lors d’un repas copieux, sous le nom de “trou normand”!»

Robe Le mot vient du germanique occidental, «rauba» c’est-à-dire «butin», depuis environ 1155. De là, on comprend mieux l’origine du verbe «dérober». Jusqu’au XVIe siècle, le mot «robe» a souvent le sens de «butin», d’où ses dérivées «à la dérobée» ou «bonne robe» pour qualifier une «bonne prise» en parlant d’une femme dans un contexte galant. Le sens de «robe» comme vêtement (attesté vers 1160) viendrait d’un glissement de sens en germanique, de «butin» à «vêtements pris comme butin», d’après ce qu’on peut lire dans le Dictionnaire historique de la langue française. «Dérober, ou enrober, c’est dépouiller ou recouvrir le corps de ce qu’il porte», écrit Marie-Dominique Porée. Une «robe» est d’abord un vêtement long que portaient aussi bien les hommes que les femmes dans l’Antiquité et jusqu’au XVIe siècle. Au fil de temps, cet habit est devenu exclusivement féminin.

Flipper Aujourd’hui, on utilise le verbe «flipper» au sens d’être «angoissé» ou «avoir peur». Lorsqu’on se penche sur l’origine de ce verbe, on découvre non sans surprise que le sens premier de ce verbe est lié... à la drogue. Le mot vient de l’anglais, «to flip» qui signifie «faire sauter le couvercle, la perruque», c’est-à-dire «s’exciter, perdre la tête». Flipper, c’est être «exalté» (sous l’effet d’une drogue) ou «abattu», éprouver un sentiment d’angoisse lié à l’état de manque.

Cf. Aliénor Vincotte – Le 07 août 2023